Lutte Contre La Pollution De L'Eau
Avec le développement de l’urbanisation et de l’industrialisation,
ainsi que l’évolution des modes de consommation, les rejets d’eaux
dites “usées” ont considérablement évolué en quantité et en qualité.
Les rejets domestiques simples se sont enrichis de produits plus
complexes (lessives…) et les réseaux d’assainissement recueillent des
rejets industriels, commerciaux ou artisanaux aux caractéristiques très
diverses. Les eaux de pluies, lessivant des surfaces croissantes de
bitume et de toitures, se chargent en produits minéraux et organiques
et augmentent d’autant le flux polluant à traiter. Lorsque les eaux
usées ne sont pas traitées, les cours d’eau sont dépassés dans leur
capacité naturelle d'épuration et se retrouvent pollués.
Le traitement ou l’épuration des eaux usées a donc pour objectif de réduire la charge polluante qu’elles véhiculent afin de rendre au milieu (?) aquatique une eau de qualité, respectueuse des équilibres naturels et de ses usages futurs (pêche, loisir, alimentation, utilisation agricole ou industrielle, etc.).
L’organisation générale de l’assainissement a donc évolué pour récupérer et traiter les eaux usées et, dans certains cas, les eaux pluviales.
Depuis la loi sur l’eau du 3 janvier 1992, tout immeuble doit être
raccordé à un système d’assainissement. Le but d’un tel système est de
regrouper les eaux usées, puis de les épurer par traitement, avant de
les rejeter dans le milieu (?) naturel.
Cycle de l'eau en ville
L'eau est captée, puis potabilisée si nécessaire, avant d'être distribuée.
Ensuite, les eaux usées sont collectées puis traitées en station d'épuration. Les eaux épurées sont rendues au milieu naturel.
Selon la nature de l’habitat et le choix de la collectivité, on distingue deux grands types d’assainissement :
l’assainissement non collectif (individuel ou autonome)
En zone d’habitat dispersé, des systèmes d’assainissement sont mis en
place pour chaque habitation (assainissement individuel) ou pour un
petit groupe d’habitations (assainissement autonome).
Un zonage délimite les zones d’assainissement autonome. Si la mise en
œuvre des travaux relève des particuliers, la commune est cependant
obligée d’en assurer le contrôle. Si elle le souhaite, elle peut
également prendre en charge l’entretien, avec évidemment une
contre-partie financière des particuliers concernés.
L’assainissement collectif
En zone urbaine ou d’habitats regroupés, les eaux usées, collectées dans un réseau d’assainissement sont traitées en station d’épuration.
- le réseau unitaire reçoit, en mélange, les eaux usées et les eaux pluviales. C’est celui qui équipe la plupart des centres villes ;
- le réseau séparatif, plus récent, est composé de deux collecteurs séparés, un pour les eaux usées, un autre pour les eaux pluviales ;
La loi sur l’eau a renforcé la responsabilité des communes sur la création, l’entretien et la surveillance des réseaux d’assainissement.
La police des réseaux fait partie des responsabilités du maire :
- un règlement d’assainissement doit être rédigé ;
- tout raccordement non domestique
doit préalablement être autorisé par la commune, celle-ci n’étant pas
obligée de traiter les eaux usées non domestiques. L’autorisation fixe
les caractéristiques que doivent présenter les eaux usées non
domestiques admises dans le réseau collectif. Une surveillance du
respect des prescriptions de l’autorisation de raccordement doit être
mise en place.
• les traitements d’épuration des eaux usées
Ils sont réalisés dans les stations d’épuration. On y dégrade et sépare les polluants de l’eau (particules et susbtances dissoutes) par des procédés physiques, chimiques et biologiques, pour ne restituer au milieu aquatique qu’une eau de qualité suffisante au regard de la capacité d’accueil du milieu récepteur.
Les procédés mis en œuvre sont multiples : ils reposent sur le principe de la séparation gravitaire (?) entre l’eau et les particules polluantes. Pour éliminer les substances dissoutes, une biomasse animale microbienne les transforme, croît, puis s’agglomère en flocs (ou amas), qu’il est alors possible de séparer de l’eau par gravité, flottation ou plus rarement par filtration.
Dans les stations d'épuration biologiques, une quantité et une variété
impressionnante de micro-organismes spécialisés participent à la
dépollution des eaux usées : les "biomasses épuratrices". Elles
appartiennent essentiellement au règne animal. Outre de nombreuses
bactéries, on trouve par exemple des héliozoaires (en haut à droite) ou
différentes espèces de vorticelles (en bas).
L’entretien des réseaux de collecte et les traitements en stations d’épuration génèrent plusieurs sortes de sous-produits.
• Les sous-produits des réseaux :
Les matières de curage des réseaux d’assainissement sont des graviers, des sables, des matières organiques et des détritus divers qui s’accumulent dans les réseaux à tous les endroits où la vitesse d’écoulement des eaux est ralentie. Pour la région parisienne, cela représente plus de 100 000 m3/an de boues de curage. En moyenne, les boues de curage représentent 18 kg/habitant/an de matières brutes (données AGHTM).
Les graisses des bacs à graisses des artisans, restaurateurs, cantines, industriels, …
• Les sous-produits des stations d’épuration :
Les refus de dégrillage : ce sont des déchets (?) solides de toute nature : bouts de bois, boîtes de conserve, flacons en plastique, feuilles, etc.
Les matières de dessablage : récupérées au niveau des pré-traitements (sable, graviers, ou particules lourdes) en quantité importante (à l’échelle d’une agglomération comme Bordeaux, les sables issus du nettoyage de la voirie et du système d’assainissement représentent une masse de 30 000 t/an).
Les matières grasses de dégraissage-déshuilage récupérées par flottation (?).
Les boues :
elles sont principalement constituées de particules solides non
retenues par les pré-traitements en amont de la station d’épuration,
des matières organiques non dégradées, des matières minérales et des
micro-organismes (bactéries dégradatives pour l’essentiel). Elles se
présentent sous forme d’une «soupe épaisse» qui subit ensuite des
traitements visant en particulier à réduire leur teneur en eau.
La quantité moyenne produite en France est de 15 kg de matière sèche/habitant/an (variation 10 à 25 kg/hab./an).
Les gaz : gaz carbonique et azote notamment, lesquels retournent à l’atmosphère.
Seules les boues d’épuration peuvent faire l’objet d’un recyclage en agriculture.
Encore faut-il qu’elles répondent à une qualité et à des règles
précises, détaillées dans ce dossier (voir chapitre 3 page 30, chapitre
4 page 33, et fiche 4.2). Les autres sous-produits de l’assainissement
sont éliminés dans le circuit des déchets municipaux. Les produits
minéraux de curage et de dessablage peuvent être valorisés en remblais,
sous réserve d’un nettoyage-calibrage. Les déchets graisseux sont
incinérables ou biodégradables (?).
La qualité des eaux usées détermine directement la qualité des boues d’épuration produites, notamment leur teneur en éléments-traces (?).
Aussi une police des réseaux efficace est-elle de la plus haute
importance pour prévenir les rejets de substances chimiques
contaminantes dans les égouts, si la municipalité fait le choix d’une
filière de recyclage agricole pour ses boues d’épuration.
• Origine des boues :
Selon le type de traitement des eaux usées, une station d’épuration peut produire, à l’origine, trois grandes catégories de boues :
Boues de traitement primaire : elles sont produites par une simple décantation des matières en suspension (MES) contenues dans les eaux usées. 70 % des MES peuvent ainsi être retenues. Avec l’évolution de la conception des stations, ce type de boues est en train de diminuer.
Boues de traitement physico-chimiques : variante du type précédent, les matières organiques particulaires ou colloïdales (?) contenues dans les eaux usées sont agglomérées par addition d’un réactif coagulant (sels de fer ou d’aluminium). 90 % des MES peuvent ainsi être captées. Séparées par décantation, les boues obtenues renferment une partie importante de sels minéraux issus des eaux brutes et de l’agent coagulant. Les boues physico-chimiques sont surtout produites dans des stations balnéaires ou touristiques, aux variations de populations très grandes sur une courte période
Boues de traitement biologique : ces boues sont essentiellement formées par les résidus de bactéries (?) “cultivées” dans les ouvrages d’épuration. Ces bactéries se sont nourries des matières organiques contenues dans les eaux usées et les ont digérées.
Pour maintenir l’activité biologique de la station à un bon niveau, une partie de la masse des bactéries ou “biomasse en excès” doit être prélevée soutirée régulièrement, entretenant ainsi la dynamique de reproduction bactérienne.
• Traitement des boues : objectifs visés
Quel que soit le mode d'épuration des eaux usées, les boues sont initialement constituées d’eau (99 %), de matière organique fraîche, très fermentescible (?), et de matières minérales dissoutes ou insolubles.
Selon l’utilisation qui doit en être faite, des traitements complémentaires leurs sont appliqués :
- pour réduire leur teneur en eau :
du simple épaississement par gravité en passant par une déshydratation
partielle (moins de 80 % d’eau), jusqu’à un séchage presque total (5 à
10 % d’eau),
- pour stabiliser la matière organique, en diminuant sa fermentescibilité pour réduire ou même supprimer les mauvaises odeurs,
- pour les hygiéniser, si nécessaire, en détruisant les micro-organismes pathogènes.
On produit ainsi toute une gamme de boues aux propriétés diverses : boues épaissies, déshydratées, séchées, digérées, chaulées, compostées, etc. Ces traitements influencent directement les propriétés fertilisantes des boues.
Epaississement des boues par une table d'égouttage installée au sommet d'un silo.On obtient des boues liquides épaissies (5 à 7 % M.S)
Déshydratation des boues par filtre à bande. |
Déshydratation des boues par centrifugation. |
Déshydratation des boues suivie d'un malaxage à la chaux vive. |
En conséquence, il est de la plus haute importance de choisir le mode de traitement des boues également en fonction des débouchés agronomiques identifiés dans le secteur géographique proche de la station d’épuration.
Une logique assez similaire prévaut pour les autres voies d’élimination. Si la boue doit être incinérée, mieux vaut qu’elle soit la plus déshydratée et la plus organique possible : la capacité à brûler (ou PCI) est alors maximisée. Si la boue doit aller en décharge, sa fermentescibilité doit être réduite et se présenter sous forme déshydratée (30 % de matière sèche au minimum) ; par exemple, les boues pourront être fortement chaulées, ou même incinérées préalablement, pour ne plus avoir à enfouir que des cendres, après conditionnement ultime si nécessaire.
• Les principaux types de boues proposés à l’épandage en agriculture
En simplifiant les choses, quatre grands types de boues sont recyclés en agriculture.
Le classement se réfère à leur état physique ou à leur mode de stabilisation :
Les boues liquides : cas des petites stations en zones rurales ou péri-urbaines (environ 15 % des tonnages de matières sèches (MS) de boues). Ces boues se stockent et se manipulent à la façon des lisiers de porcs ou de bovins,
Epandage de boues liquides à l’aide d’une rampe adaptée sur une tonne à lisier
Les boues pâteuses : cas des stations de taille moyenne. Ce type de boues (environ 35 % des tonnages MS) est difficile à manipuler et à stocker. Surtout, il favorise les fermentations (?) anaérobies (d’où un problème d’odeurs). On applique de plus en plus à ces boues un traitement complémentaire à la chaux ou par compostage,
Les boues chaulées : cas des stations de moyenne ou de grande taille. Selon le procédé utilisé et la dose de chaux incorporée, ces boues sont de consistance pâteuse ou solide. Ce type de boues est fréquent en France (environ 30 % des tonnages MS de boues sont chaulées),
Boues pâteuses chaulées en stockage provisoire au bord du champ.
• Statistiques sur la production de boues d’épuration
Perspectives d’évolution
Fin
2000, la France produit 850 000 tonnes de matières sèches (t MS) de
boues d’épuration municipales, soit environ 9 millions de tonnes brutes
(tous types de boues confondus). Ces chiffres souffrent d’une certaine
imprécision, liée aux imperfections du système statistique national,
mais constituent des ordres de grandeur généralement acceptés.
Les projections d’évolution de la production de boues d’épuration sont directement fonction des progrès du système national d’assainissement des eaux usées (collecte et traitement). Dans le rapport présenté à la Commission Européenne, en application de la Directive Eaux usées de 1991, la France a annoncé, sur la période 1992 - 2005, une augmentation de 26 % de la capacité des systèmes de collecte, et de 72 % de la capacité des stations d’épuration, ce qui constitue un effort d’investissement particulièrement important de la part des collectivités.
Concrètement, si le taux de dépollution (part de la pollution traitée sur la pollution émise) passe de 49 % actuellement, à 65 % à l’horizon 2005 (objectif fixé par les pouvoirs publics), la production de boues d’épuration pourrait atteindre, à cette date, 1 100 000 t MS, soit une augmentation de 30 %.